05/09/2011

Soutien du C.H.A.T.

Le Cercle d'Histoire et d'Art de la Thudinie se mobilise pour le sauvetage de la Chapelle des Soeurs grises. Ci-dessous, vous trouverez la copie du courrier adressé au Collège communal de la Ville de Thuin.



Thuin, le 2 septembre 2011





                                Monsieur le Ministre Paul Furlan, Bourgmestre en titre,
                                Monsieur le Député Philippe Blanchart, Bourgmestre faisant fonction,
                                Mesdames et Messieurs les Echevins,

Permettez-nous, au nom du Centre d’histoire et d’art de la Thudinie, et – nous y insistons – sans aucune considération politique, de nous inquiéter du sort de la chapelle des Soeurs grises à Thuin.

Depuis des décennies et sous des majorités communales différentes, on n’a pris que des mesures
d’urgence (filets, échafaudages, fermeture d’une rue) pour éviter tout risque d’accident aux élèves, aux passants et aux riverains, sans jamais aborder la question de fond, à savoir une affectation du bâtiment, en fonction de son style et de son ancienne vocation de lieu de culte.

Aujourd’hui, nous apprenons que pour des raisons de sécurité, il s’avérerait nécessaire de procéder à une « déconstruction », voire à une démolition pure et simple de la chapelle. Cela nous paraît invraisemblable, car le bâtiment est classé et n’est pas en plus mauvais état que ne l’était, par exemple, la chapelle Saint-Roch (XVIIe siècle, à Ham-sur-Heure, dont les murs, côté rue, penchaient dangeureusement et ont été démontés sur une hauteur de 2 ou 3 mètres et reconstruits.
Il est possible qu’une démolition totale, outre qu’elle dénaturerait à cet endroit le tissu urbain et risquerait par la suite de modifier l’ensemble construit (Thuin étant reprise comme site urbain à protéger), coûterait sans doute plus cher qu’une restauration. Que l’on démonte la charpente soit ; que l’on «déconstruise» au sommet des murs une ligne de pierres branlantes et quelques lits de maçonnerie en briques, soit encore !



Le Centre d’histoire et d’art de la Thudinie, les férus du passé, les amoureux du patrimoine éprouveraient de vifs regrets de voir disparaître cet édifice du XVIIIe siècle qui a été reconstruit après un incendie, aux frais de l'abbaye de Lobbes et de son abbé, Théodulphe Barnabé, qui était l’oncle de la mère supérieure du couvent à cette époque.

Nous aimerions attirer votre attention sur certains éléments de haute valeur patrimoniale présents dans cet ensemble :
- la cloche du XVIIIe siècle;
- l’autel et ses anges dorés baroques;
- la pierre sculptée au-dessus de la porte latérale, réalisée par Jean-Marie Abel, à la demande du notaire Deltenre.
Signalons encore que la reconstruction de cette chapelle est l’oeuvre de Jean-Baptiste Chermanne (1704-1770), l’un des rares architectes wallons antérieurs au XIXe siècle connus. On lui doit aussi l'Hôtel de Groesbeeck-de Croix (1750-1752) à Namur, le château de Franc-Waret (1749-1755), mais aussi de nombreuses églises dans la région (Laneffe, Florennes, Thirimont, Aublain). Il a en outre été le directeur des travaux de la cathédrale Saint-Aubain à Namur (1751-1760) et le restaurateur de la Collégiale Sainte-Marie et Saint-Théodard et donc, par la même, du Beffroi à Thuin (1755). Originaire
d’Hanzinelle, il s’était installé dans les années 1730 dans notre ville dont il a été à trois reprises bourgmestre (1753, 1760 et 1764).

Vu l’intérêt de ce bâtiment, nous prenons donc la liberté de vous proposer des suggestions d’utilisation : il manque à Thuin, chef-lieu d’arrondissement dont la vie culturelle et artistique a toujours été active depuis des décennies, une salle de conférence, une salle de concert de musique de chambre et les organisateurs de telles manifestations doivent se rabattre sur les églises ou quitter le centre ville.

De même, en ce qui concerne les expositions : au début des activités des Artistes de Thudinie, ces expositions étaient présentées dans la salle des fêtes du premier étage de l’ancien Hôtel de ville. Par la suite, les Artistes durent utiliser La Carrosserie d’Aulne, puis l’église moderne, puis le Château privé du Fosteau et, en dernier lieu, la Distillerie de la ferme de la Cour à Ragnies.

Pour ce qui concerne le C.H.A.T., dont nous ne vous détaillerons pas toutes les manifestations, sachez que n’ayant pas trouvé à Thuin, en 1976, un local suffisant pour l’exposition Trésors d’art et d’histoire de la Thudinie, nous dûmes occuper pendant deux mois la collégiale Saint-Ursmer de Lobbes. Nous y avons reçu plus de 14.000 visiteurs, dont la reine Fabiola, et notre bénéfice financier fut de l’ordre de 450.000 francs après un investissement de 800.000 ! Vous imaginez le retentissement dans la population, dans la presse et les gains des commerçants, restaurateurs et cafetiers du coin !

Nous avons pris contact avec la Commission des Monuments et des Sites de Wallonie et avec Madame Noirhomme, architecte qui a eu en charge la question de la Chapelle des Soeurs grises. Nous avons aussi alerté l’Institut du Patrimoine wallon et Madame Yannick Sarre qui est en charge du dossier.

Nous avons adressé, au nom de nos centaines d’abonnés, une lettre à Monsieur le Ministre Lutgen, qui a en charge la protection du patrimoine, afin de le sensibiliser aux risques qui menacent la Chapelle et de le solliciter pour une aide financière à la réaffectation.

Et nous vous demandons instamment et respectueusement de faire tout ce qui est en votre pouvoir pour conserver ce bâtiment ancien et lui trouver une destination.

Le Centre d’histoire et d’art de la Thudinie reconnaît, avec honnêteté, que depuis l’inauguration du Beffroi, l’installation de la Maison et de l’Office du tourisme, la création de l’exposition permanente Marguerite Yourcenar dans la salle du Collège, de la collaboration entre la Ville et la C.H.A.T. lors de l’inauguration de l’Hôtel de Ville rénové et l’exposition d’une centaine de peintures de notre patrimoine, l’esprit a changé à Thuin, nous en sommes bien conscients et bien reconnaissants. Mais Thuin ne peut se priver de la Chapelle des Soeurs grises, pas plus que de la Tour Notger, pas plus que de l’église Notre-Dame-del-Vaux.

Le succès du Musée du tram vicinal, de la Maison de l’imprimerie, du Musée de la Batellerie doit nous inciter tous ensemble à poursuivre dans ce sens : le tourisme est une ressource essentielle pour la Ville.

Notre but n’étant pas de critiquer mais de construire, nous espérons que vous voudrez considérer cette lettre dans ce sens et nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, Monsieur le Député-Bourgmestre, Mesdames et Messieurs les Echevins, l’expression de nos sentiments les plus respectueux.

Jean-M. Horemans                                                                                                    Thierry Lemoine
Président                                                                                                                    Vice-président